• Le vétéran et l'enfant ( hommage à Neil Armstrong et ceux d'Apollo)

     

    Quelle merveilleuse sensation que de sentir la pesanteur de son corps!

    Délesté de mon envahissante combinaison de survie, refuge hors duquel pourtant le vide m’aurait broyé, je vais à mon gré au milieu de ces cratères.

     

    Ici, je ne suis plus un pantin aux mensurations disgracieuses, et qui rebondit de pas en pas, jouet d’une atmosphère fantôme.

     

    Au lieu d’un plâtre grisâtre et collant, mes semelles s’acoquinent avec une terre vivante,qu’une giboulée de printemps a rendu odorante.

     

    Je m’avance sur le promontoire aménagé au delà de cette première balafre de cratères.

     

    Des sons me parviennent, mêlant la peur et l’exaltation, le fracas et le silence définitif.

     

    Un Vulcain invisible martèle le sol, tandis que des nuées de créatures s’entrechoquent.

     

    Certaines ne sauront jamais qu’en leur nom, j’ai franchi aussi une autre frontière.

     

    La vie a recouvré ses droits sur ces cratères, tandis que là d’où je viens, une tranquillité stérile a fait vœu d’éternité.

     

    Quelle merveilleuse ivresse que l’anonymat d’une empreinte sur ce sol étranger, et que je peux partager avec des inconnus venus de tous les horizons.

     

    L’astre qui vient de se lever dans sa splendeur trompeuse, tente de ma rappeler un serment de fidélité imaginaire aux cratères d’en haut.

     

    Tout au plus a-t-il réussi à congédier momentanément le feu et le sang , pierres de la Genèse des cicatrices de ce lieu.

     

    J’ai pu de même esquiver le protocole en quittant le sanctuaire, m’échappant sur une musique mélancolique qui dit, heure par heure, la nostalgie et l’amour du pays aux pauvres types dont les bras en croix de marbre blanc, sont désespérément glacés.

     

    Quelle évidente révélation enfin que de comprendre que la métamorphose des cendres en lune flamboyante , cycle régulier et immuable , met en pleine lumière cette chimère unique qu’est notre terre patrie.

     

     

    Et dans les regards que je croise, celui d’une enfant et de ses parents, je ne lis qu’un peu d’humanité, pas d’admiration.

     

    Que l’on me considère comme le vieil homme que je suis devenu, chaque pas accompli en direction de l’autre, c’est ça le bond de géant !

     

     

     

     

     

    (Souvenir d’une rencontre imaginaire avec Neil Armstrong, cimetière américain de Colleville-sur-mer, printemps 2008)

     

     

     

     

     


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