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    Depuis ma détention dans la Cité d'Epsî, j'ai connu le pire des désespoirs, celui qui vous colle aux semelles comme une terre glaiseuse, mais aussi de purs moments de félicité comparables à ceux que m'offre un soleil généreux sur les champs de blés.

    Dans la Cité d'Epsî, les allées perpétuellement éclairées d'une lumière crue sont parsemées de portes aux mécanismes complexes.

    Seuls les gardiens des pièces secrètes en autorisent l'accès.
    Ils ont tous d'austères uniformes blancs simplement frappés de leur grade au poitrail, du général en chef que tous écoutent avec attention, à l'ensemble de la troupe composée d'hommes rugueux et de femmes aux sourires glacés.

    Je suis bien traité et bénéficie même d'une cure d'éternelle jeunesse.

    Mais je reste prisonnier.

    Lorsque j'ai découvert dans le pré qui borde ma ferme l'engin tombé du ciel, je ne pensais pas qu'il allait précipiter ma perte.
    Sûrement pour me tester, pour mesurer des radiations, les effets d'une contamination, les maîtres d'Epsî le laissent en ma possession dans mes appartements de condamné.
    Comme par enchantement, la soucoupe s'anime dès que les geôliers ont achevé leur rituel quotidien consistant à se questionner les uns les autres sur mon sort.
    J'ai pourtant le sentiment que c'est la réclusion d'un innocent à perpétuité qui accompagnera ma jeunesse éternelle, et qui constitue l'arrêt définitif de ce tribunal d'un autre univers.

    Telle est donc la terrible sentence pour avoir, conformément au droit de tout propriétaire honnête, récupéré ce petit vaisseau qui tournoie cependant aux caprices de ma volonté.
     

    La nuit, il s'illumine et je crois distinguer de petits hublots derrière lesquels un équipage minuscule tente de communiquer.
    Ce chuchotement se mêle avec douceur au vrombissement de la soucoupe animée.

    Par voie télépathique, ces autres captifs, tombés dans le piège d'Epsî lors de vastes opérations galactiques de conquête, me disent de garder espoir.
    Un jour, je retrouverai mes champs dont les joyaux dorés sont un océan dressé d'épis nourriciers.
     

    Un jour aussi, mes compagnons d'infortune me l'ont confié en esprit, ils gagneront le ciel, les étoiles, et leurs forteresses millénaires aux remparts d'émeraude.

    Et je serai, me murmurent-ils,leur libérateur.

    Dans les allées d'Epsî, dont la lumière ne connait qu'une saison, blanche et dure, j'ai hélas oublié l'odeur de ma terre fraîchement labourée.
    Seuls les remèdes d'éternelle jeunesse me redonnent goût à la vie.
    Et je sens à nouveau dans ma chair, ces interminables journées de labeur, attelées à la course du soleil.
    Une vie que j'aimais.

    Mais dans la citadelle de haute sécurité où l'on me tient au secret depuis plusieurs moissons, une porte s'est enfin ouverte.
    Le garde de faction s'est étrangement volatilisé et le pont-levis ainsi abaissé invite tous les prisonniers d'Epsî à chevaucher glorieusement vers leurs terres promises.
    Je feins un lourd sommeil et scrute en fait le moindre mouvement, épie le moindre bruit, aux alentours de ma cellule.

    D'une main je me saisis de ma soucoupe précieuse.
    Je sens vibrer dans le métal inconnu dont elle est conçue, d'imperceptibles petits cris de joie.
    Encore allongé dans mon lit, tout en ayant pris soin de serrer du plus fort de ma rage et contre ma poitrine, le vaisseau des étoiles, je m'apprête à bondir tel un guerrier.
    Les allées d'Epsî me feront une haie d'honneur.
    Je serai beau comme cet athlète antique des livres d'histoire.

    A peine le temps d'imaginer ma gloire au ciel sans nuages, qu'un sort ou un rayon invisible me paralysent.
    La soucoupe, et son équipage qui espérait tellement de son héros, glisse tristement et interminablement sur le sol lustré.
    Elle percute une plinthe grisâtre et rebondit comme le vulgaire palet d'un jeu dérisoire.

    Un garde blanc, la longue femme que je hais depuis toujours, grimace une réprimande.
    Elle se penche avec d'autres visages crispés, sur mon corps privé de liberté.
    Je constate horrifié, que mon trésor et le peuple du firmament, me sont enlevés, en guise de représailles.

    Le traitement d'éternelle jeunesse peine à me consoler depuis.
     

    J'ai même commencé à souffrir, sans que la ronde des geôliers livides souriant tels des automates à mon chevet, ne m'apporte le moindre réconfort.

    Avec les philtres étranges malgré tout, je n'ai à présent plus de corps douloureux, mais je rêve à en être torturé de ma ferme, de mes parents, des livres qui furent mes tapis magiques.

                                                                    ****

    C'était un vide grenier d'été comme il en existe de nombreux dans les villages qui voient déferler des gens à la recherche de la vieillerie "branchée", ou des professionnels rusés en quête de la vraie bonne affaire.

    Elle avait, celle-ci,  capté tout de suite  mon attention.

    " Elle te plaît? Tu la veux?"

    L'enfant de 6 ans qui n'en réclamait pas tant, mon fils devenu alibi de cet achat sans lien apparent avec mes goûts habituels, se fit un plaisir joyeux de tendre fièrement avec ma bénédiction, le billet et demi qui plaçait dorénavant l'objet sous ma protection.

    "Merci papa! "

    La petite joie enfantine, exprimée à la lumière de son visage d'ange bouclé, fit de moi pour quelques instants, le pire des diablotins manipulateurs.

    Au retour, mon acquisition reçut comme je le craignais, un accueil pour le moins réservé.
     

    " N'as-tu rien trouvé de plus moche et de plus cabossé? " 

    La prédiction fut faite que cette antiquité finirait rapidement au rebut.
     

    Sauf à ce qu'il me prenne la lubie d'entamer une collection, j'étais averti qu'elle n'aurait de toute façon pas sa place dans les vitrines de la maison.

    Manifestement, la régente de notre foyer avait sans l'ombre d'une hésitation, deviné que le véritable possesseur du jouet était un grand dadais subissant les assauts de la nostalgie. 

    "Moi je l'aime bien maman!".

    Mon innocent complice qui semblait lire dans les pensées les plus tortueuses, arracha quand même un sourire providentiel à sa mère.

    La nuit devait heureusement porter conseil et adoucir les objections.

    Je l'espérais.

     

     

    Notre chérubin que j'avais entendu actionner frénétiquement à son réveil le poussoir du jouet, conservait intact son enthousiasme de la veille.

    Je le regardais ainsi jouer du haut de sa toute jeune existence, avec au tréfonds de mon être ce même sentiment infini d'amour, celui qui semblait aussi animer le petit Raphaël au contact du jouet rescapé d'un ailleurs, il y'a bien longtemps. 

     

     

                                                                 ****

     

    La succession du Jean , érudit et féru d'odyssées mythologiques, tout autant que d'épopées spatiales, un vieux gars, l' héritier de la ferme des Bréhand, fut bien vite réglée.

     

    Il s'était éteint d'un vilain mal, orphelin amnésique dans l'unité Alzheimer d'un établissement plein de résidents n'attendant plus grand-chose de la vie.

    Comme son existence ne se conjuguait plus au futur, il se contentait d'arpenter, comme eux, les couloirs de l'antichambre du départ ultime, en d'interminables  promenades quotidiennes durant lesquelles on tourne en rond, prisonnier d'un passé souvent lointain.

    De tous ses biens, légalement aimantés par des bénéficiaires presque inconnus de ce fils unique aux lectures et aux voyages imaginaires qui racontaient toujours demain, ne subsistait qu'une babiole de la fin des années 50.

    Elle représentait probablement le jouet préféré, lui-même rescapé d'une époque révolue.

    Ce bibelot dont le patient ne voulait plus se séparer, ornait une étagère dans sa chambre et fut restitué à la famille par l'infirmière coordonnatrice des soins.

    L'un des cousins de la ville s'était empressé de le fourguer à un trafiquant qui lui en avait donné deux sous.

    Deux sous pour un rêve aux confins de l'univers qui pourtant n'avait pas de prix.

     

    Et qui pouvait bien se soucier du fait que le défunt Jean n'avait  jamais eu vent de cette drôle de toupie, avant qu'elle n'échoue mystérieusement dans son champ, bousculant insidieusement le cours de vie, en  giflant au passage quelques brins d'herbes innocents ?

     

    Il s'était perdu, après cet événement méconnu de tous, dans les méandres d'un comportement qui congédie la raison, et s'était mis à croquer ces grains de folie que les vieux semblent affectionner au couchant de leur vie.

     

                                                         *****

     

    Mon fils me raconta aussi le lien qui l'unissait déjà au jouet du siècle dernier.
     

     Quoi de plus naturel après tout que cette toupie, réplique fidèle d'une soucoupe volante et dont la peinture écaillée trahissait de toute évidence les frottements répétés des entrées dans la haute atmosphère, rencontre dans le regard de notre enfant une énergie inépuisable.

     

     Une force de vie qui ouvre à des voyages où se nouent des complicités sans frontières d'espace et de temps.

    Son nouvel ami, ou plutôt, ses nouveaux amis lui "causaient" des drôles de secrets.

    "Tu sais papa, ils vont bientôt repartir dans les étoiles quand ils auront entré dans la tête des savants quand ils font des rêves, des explications pour les bobos " 

    Il était presque exalté, à bout de souffle, pour ne pas dire possédé par l'univers qu'il venait de s'inventer, un monde naissant que moi-même, j'aurais eu peine à imaginer. 

    J'étais un peu déboussolé et ne pus que livrer qu'une question banale et bancale pour entrer dans son jeu.

     "Elle vient de quelle planète la soucoupe mon ange et comment ils s'appellent ces martiens?"

    Il me considéra avec une expression de méfiance inhabituelle, fronçant les sourcils tel le maître d'école insatisfait de la remarque d'un cancre.

    " N'importe quoi papa, c'est pas des martiens, c'est pas des luniens, ou des trucs comme ça"

    Comme je ne réagissais plus, il enchaîna avec conviction.

    "T'es trop pas cosmologiste pour comprendre!"

    Retenant un rire plus attendri que moqueur, je lui offris un redoutable "Ah bon ", auquel il répondit avec aplomb

    "Ils habitent des maisons en verre,  qu'on peut pas voir, et grandes jusqu'au ciel, loin du "syssème colère" de la terre, mais à côté par des "trous verts"..."

     

    Soucieux de ne pas abuser de sa patience d'initié, je pris congé de notre fils, le laissant aux confidences extraordinaires des habitants d'outre- monde.

    Qu'une toupie expédie provisoirement aux oubliettes ses jeux ultras perfectionnés n'était d'ailleurs pas pour me déplaire.

    Jusqu'où pouvait-il aller dans son nouveau royaume? 

     

    Quand la porte de la chambre se referma, des chuchotements reprirent et je me retins de regarder par le trou de la serrure.

    J'étais certes impatient de connaître la suite, mais le plaisir de goûter demain aux fruits de sa créativité d'enfant, l'emportait sur cette velléité de lever impudiquement le voile sur son jardin secret. 

    Et ça n'était que la première nuit!....

     

                                                               ****

     

    Je m'appelle Raphaël Sielmé, spationaute et chercheur spécialisé en neuropsychologie du vaisseau "Bradbury 01",  actuellement en orbite autour de Mars, .

    Au cours de cette soirée du réveillon de Noël 2058, j'ai tenu à saluer les habitants de la Terre, dédiant tout spécialement mon plus beau numéro de magie aux enfants malades.

    Pendant quelques instants, j'ai en effet laissé flotter dans notre habitacle exigu un jouet venu d'ailleurs, ma relique préférée, sorte d' invitée surprise de la fête improvisée.

    Ce qui a fait dire aux membres d'équipage que "les français sont décidément des poètes, même à 65 millions de kilomètres de la planète mère!"

    Qu'importe, j'ai profité de ma prise de quart pour larguer la soucoupe dans le vide spatial à la verticale d'Olympus Mons, non sans l'accompagner spontanément de simples mots d'adieu:

    "Bon retour chez vous!" 

    La toupie deviendra j'en suis certain un nouveau satellite, protecteur de la mission.

    Un talisman contre la tyrannie des évidences.

    Son scintillement imperceptible, au ciel du soleil pâle des canyons de Mars, sera comme un regard d'enfant posé sur le royaume du dieu guerrier.

    Deimos et Phobos, vigies de l'aube naissante, salueront quant à eux ce matin, l'arrivée de notre caravelle sur les canaux du temps jadis.

     

                                                             ****

     

    Dans les couloirs de la Cité d'Epsi, résonne encore l'écho de rêves inassouvis, les soupirs de l'âme d'un vieil homme redevenu enfant.

    Elle rejoint au firmament de la nuit d'une étoile guide, le regard émerveillé d'un petit garçon en habit d'adulte qui ouvre d'un premier pas, le territoire sans limites des songes de demain.

     

     

    Prisonnier de la Cité d'Epsî


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  • En dépit de diverses tentatives , plus ou moins fumeuses, pour une relecture de l'Histoire à la lumière de textes sacrés, de témoignages dignes de la foi qu'ils expriment, de clichés davantage troubles que troublants, force est d'admettre qu'à ce jour, la terre n'a jamais été visitée.

    Les manifestations spectaculaires de phénomènes aussi aériens soient-ils, par vagues ou isolés, ont peine à survivre au bon sens le plus élémentaire.

    L'angélisme de toute une communauté respectable, fidèle au mythe des signes de feu, ou sous la coupe de prédicateurs de soucoupes, se fait cruellement couper les ailes par des instruments tranchants qui scrutent froidement le ciel.

    Dans l'espace dit « aérien », peu de place est laissée au rêve léger, lumineux, et furtif.

    A ce titre, par exemple, pour l 'aéroport  précolombien de Nazca, balisé de fameux géoglyphes, on aura beau invoquer avec conviction Notre-Dame-Des-Landes, ce coin de désert est pour l'heure comme le toponyme susnommé, vierge de tout atterrissage 

    Plus sûrement destiné à rallier les bonnes grâces des dieux pour irriguer au mieux les sols, ou selon une autre thèse audacieuse, sorte de métiers à tisser géant pour les « panchos » funéraires, ce site magique est plutôt l'expression de concepteurs qui avaient d'autres chats à fouetter que de préparer un hypothétique débarquement venu des cieux.

     

     

    Dire que l'humanité n'a jamais été visité ne signifie pas qu'elle n'a pu être inspirée.

    Cet interstice de mystère dans la muraille du savoir reste pour l'heure à combler. 

    Il oppose d'honnêtes gens, provoque des soubresauts inutiles et l'agacement de ceux qui trouvent inconcevable que la raison puisse par instants sortir des radars.

    La question restera sans réponse, il faut l'admettre.

    Quelle que soit notre chapelle, ce dont nous sommes certains, c'est que l'humanité est priée d'avancer.

    Elle n'a pas d'autres choix.

     

    La question des OVNI ne cache-t-elle pas d'autres interrogations douloureuses ?

    Eteignons je vous prie les radars, suspendons pour un temps la psychanalyse des croyants de tout poil...

     

    Pourquoi fichtre ces objets qui jalonneraient notre Histoire font-ils tant de manières pour entrer gentiment en contact avec nous ?

    Depuis le temps !

    Sommes-nous infréquentables, inhumains, primitifs?

    Ce triptyque désagréable, voire inquiétant semble se déployer tout naturellement comme la seule réponse plausible à ce mutisme « E.T. » 

    A supposer aussi l'existence de représentations mentales, une vision du monde tellement exotique, que cette question même n'effleure pas nos visiteurs de certains soirs, la situation devient désespérante,carrément insoluble, et l'on tourne en rond.

     

    Mais au fond, n'est-il pas heureux que ces martiens qui ont laissé la planète rouge dans un bien triste état, nous prennent d'aussi haut ?

    Sommes-nous prêts, nous qui trouvons étrange un persan, suscitons le dégoût de nos proches amis « brexitants » en consommant avidement des gastéropodes farcis  de beurre aillé à en perdre haleine, sommes-nous prêts à affronter ce que j'appelle l'altérité absolue ?

    Je parle d'un autre dans lequel, à la loupe, sous la toise, en vidéo, en audio, sous toutes les coutures, on ne déniche pas l'once, la plus infinitésimale présence d'un « moi », un tout petit « moi », de celui que l'on devine quand même derrière le masque rituel des peuples les plus aux antipodes de notre quotidien.

    Ca n'est pas « moi » , mais au moins, ça reste « moi ».

    Je demande à chacun d'imaginer une milliseconde sa réaction à la vue d'un étranger vraiment hors-sol, qui proviendrait d'un ailleurs invisible, et en une forme la plus inattendue, donc inimaginable. Il nous faudrait alors faire abstraction des « E.T. » hydrocéphales aux yeux bridés et aux oreilles de Mr Spock , ou du  blondinet prétendument vénusien à combinaison ajustée , espèce de clone de Patrick Juvet...

     

    Je crois que l'humanité a encore, au delà de ses crises, ses grands fracas de vies brisées, de beaux jours devant elle, et si elle laisse provisoirement voltiger quelques soucoupes d'illusion, enfants naturels des contes de fées, le danger est bien modeste si l'on exclue les extrémismes imposteurs et mortifères.

    Elle qui balbutie encore sa fraternité depuis le premier homme, pourquoi aurait-elle résolu, d'un coup de baguette magique sur les doigts des rêveurs, toutes les équations qui régissent l'ordre de l'univers ?

    Les soucoupes finissent toujours par atterrir et celles-là sont la preuve que l'inspiration de l'humanité n'a pas de limites. 

     

    Le grand vaisseau mystère c'est bien aussi notre planète vivante qui avance dans le vide des espaces interstellaires.

     

    Une lumière dans la nuit, pour de vrai.

     

     


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  • Mon mysticisme à moi, il s'est forgé en ne m'étonnant plus de rien dans un premier temps, puis en m'étonnant d'un rien avec le temps.

    Ce n'est pas le mysticisme « haut de gamme » qui s'affine sous les ciels limpides d'un désert stérile de l'hémisphère sud, porté par le regard sans concessions d'un photographe en service commandé. 
    Celui-là, c'est du mysticisme « durable », « raisonné », en circuit court avec la raison.
    N'importe quel mystique vous le dira, rien ne vaut pourtant le désert pour s'encanailler avec l'invisible!

    Le mien, il est ancré dans les traditions de la terre bourguignonne.
    Il est donc provincial et plein de bon sens.

    Observer le curé et ses sbires consommer sans vergogne le corps du Christ et boire son sang chaque dimanche en fin de messe, laisse l'enfant paroissien plus que songeur.
    Du coup, il lève d'instinct le nez en l'air en attendant que ça se passe, histoire d'avaler cette drôle de pilule, de tenter de comprendre ce tour de passe-passe. 
    Il fixe son attention sur la coque du bateau-cathédrale qui flotte sur les nuages, son regard vagabond croisant alors des tableaux de verre veinés de plomb et une rosace qui déposent à ses pieds des éclats de lumière colorés. 

    On jurerait que la nef est prête à décoller.

    D'ailleurs, tous les saints personnages et les martyrs divers, flottent déjà en apesanteur dans la hauteur des travées du vaisseau à tuyères de gargouilles.
    Ce sacré panoramique nous rend un peu chair du Canon des émerveillements à venir, il fixe à tout jamais la règle de nos sensibilités pour l'outre-monde, là où l'Eternité est de mise.
    Comment ne pas aimer alors sans compter le ciel et les étoiles, de toutes sortes?

    Après un gros orage d'été, il faut voir le soleil captif s'agiter en mille scintillements dans une flaque d'eau.
    Et quand la nuit regagne son terrain, que la nappe piquetée de lucioles se déploie pour le festin des rêveries, mon ciel bourguignon chuchotant ses splendeurs s'offre au regard du gourmand.

    Un satellite à la trajectoire rectiligne avance placidement.
    Vénus qui joue à l'OVNI, nous a encore pris pour des candides mais un peu bernés cependant.
    Enfin, le phare d'un avion qui passe de nova à nébuleuse, disparaît comme par magie.

    Ces attractions ne font qu'aiguiser l'appétit pour l'arrière scène.

    Les nuits calmes, transparentes, et foisonnantes d'étoiles, nous rendent perceptibles le mouvement de l'univers, comme un balancement léger, un vertige délicieux.
    Ce sentiment, ce petit rien dont je m'étonne encore, c'est mon mysticisme au ciel imparfait, posé sur des vallons dont nombre des pointes de fusées sont les girouettes des églises.

    Quand viendra le temps où un émissaire du cosmos, fier dans son costume inévitablement argenté se posera sur ma terre, je l'inviterai d'abord à faire silence à mes côtés et à contempler la voûte céleste.
    Je lui poserai ensuite cette simple question qui n'attend évidemment pas de réponse:
    "-qui y'a-t-il de plus beau?"
    Et si son métabolisme le permet, il terminera bras en croix ou tentacules déployés sous les étoiles, converti à mon mysticisme paysan par un Chablis bien frais.

    Je me demande même si je n'aurai pas sauvé la terre d'une  invasion annoncée..


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  • Le cri

    Homo sapiens est l'exemplaire probablement unique d'une évolution hasardeuse dans un environnement propice, et que des mutations successives avantageuses, ont mis en situation d'assurer, par transmission du patrimoine génétique, la pérennité son espèce.

     

    La science a démontré que le processus vital dont il est issu n'a pas besoin de l' intervention d'une nature transcendante pour se réaliser.

     

    Ses aptitudes cognitives le placent en situation de domination au sein du vivant, de la capacité à modifier son milieu, jusqu'à celle de dupliquer ce même vivant en laboratoire.

     

    A l'échelle des temps géologiques, du pas de la conscience réfléchie, du langage, au premier pas sur la lune, il ne s'est écoulée qu'une fraction de seconde pour cet hominidé.

     

    Emportés par la tempête dévastatrice d'un astéroïde exterminateur ( d'autres thèses plus "endogènes" existent), les dinosaures, eux, font figure de patriarche au regard de l'émergence du juvénile Homo sapiens qui risque d'être finalement météorique!

     

    Qui peut dire si de nouvelles mutations feront mentir cette chronique d'une fin annoncée, voire comme le disait déjà un ami jésuite dans les années 50, dans une improbable échappée à la mort par expansion sidérale via l'astro-nautique?

     

    Alors qu'aucune grand voile d'un quelconque radiotélescope n'a encore été agitée par le moindre signe de vie d'un exo-monde, l'homme reste pour le moment une sorte d' "hypothèse hasardeuse" plutôt réussie dans le cosmos.

     

    Nulle preuve à ce jour que dans cet espace infini de plus de 14 milliards d'années d'existence, nous ne soyons pas tout bêtement condamnés à l'isolement, de par notre nature singulière, ou simplement, parce que nous sommes seuls!

     

    On reste dans l'ordre de la spéculation, alimentée de bonne foi par ceux qui exercent leur magistère tant dans le domaine scientifique que spirituel, et qui font souvent se confronter dogmes et croyances.

     

    Le cri

    Ce spécimen du genre humain saisi dans un musée,  mime un cri à la face de cet ancêtre d'un autre temps, d'une autre espèce, soit pour le "singer "par jeu, soit pour exprimer une forme d'angoisse devant cette altérité royalement  tyrannique, effrayante, soit pour marquer le triomphe final de l'Homme (qui est en cette occurrence une femme).

     

    Personne pour la contredire dans le ciel actuellement...( et même sur terre, aucun homme n'oserait se mettre en danger)

     

    Elle risque tout au plus une extinction de voix, alors que le vénérable prédateur a subi la voie d'une supposée violente extinction.

     

    "Peut-être je serais vieille un jour ,mon vieux fossile, cependant je n'ai que 300.000 ans et je t'emmerde en attendant"...

    Le cri

    Il m'est idée qu'au travers de nos investigations les plus rigoureuses sur les conditions d'émergence du vivant, la pluralité des mondes, l'interrogation inscrite en filigrane est bien celle de notre devenir, ce qui rend insupportable la perspective d'imaginer un monde sans limite dépourvu de "l'autre".

    Pour conclure ce modeste billet, j'ai le sentiment que la communauté scientifique, à l'instar de certains croyants, doit se résoudre sur la question de la propagation du vivant et d'autres "humanités" dans l'univers  à une sorte d '"optimisme tragique" tel que le philosophe Emmanuel Mounier qualifiait son sentiment personnel.

     

    Continuer un combat quotidien pour élaborer des théories validées par l'expérience, explorer, tout en gardant l'espoir en dépit du silence assourdissant des grands espaces, rester fidèle aux fondements rationnels de son action, tout en préservant sa liberté de conscience.

     

    Un curseur évidemment plus que complexe à déplacer, en constante évolution... 

     

     

     


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  • Un génie a placé la gare de Perpignan au centre du monde.

    C'est donc là un fait incontestable.

    Les chats de Cadaques, centre de l'univers

     

     Incontestable et bouleversant à l'heure où les rencontres avec d'autres mondes, d'autres humanités, n'a pas encore sonné.

     Le temps passe.

     Au rendez-vous de l'altérité, les montres et leurs aiguilles restent désespérément molles, insensibles aux beaux miroirs de télescopes titanesques, d'antennes déployées comme une grand-voile, de satellites scrutateurs de rayonnements primordiaux, et de sondes, paparazzi acharnés de terres étrangères mais sans vie.

     Toute une avant-garde des sciences pures et dures mise en échec sur ce plan, même si les exoplanètes se pavanent à foison, mais sans rien promettre.

     De l'exoplanète à l'exo-monde, il y a sûrement un pas de géant à accomplir !

     Le centre du monde pour mon ami le sulfureux génie, c'est un  lieu exclusif, unique et définitif qui regroupe deux "qualités" essentielles:

     1) un lieu qui inspire

     2) un lieu où l'être préservé miraculeusement d'un cataclysme s'épanouit pleinement dans la quintessence de la pensée créatrice

      Et si le centre même de l'univers pouvait aussi se situer à moins de 100 kilomètres de la gare de Perpignan ?

     Qu'en disent de généreux docteurs qui condescendent à se mettre au niveau du candide ?

     « Le début de l’expansion était et est toujours exactement en tout point de l’univers, c’est-à-dire partout. On peut encore détecter la lumière issue du Big-Bang sous la forme d’un rayonnement cosmique appelé "Fond diffus cosmologique", ce rayonnement remplit l’espace en tout point et se propage dans toutes les directions en même temps à partir de partout. » 

     Mon ami, le génie qui s'asseyait parfois sur toute réalité au mépris des conventions, aurait apprécié la vision de ces chats de Cadaqués.

     

    Les chats de Cadaques, centre de l'univers

    Et se serait probablement étonné ou amusé de la relative modestie de sa révélation sur la localisation catalane du centre du monde !

     Ces chats paraissent envoyer le plus noir d'entre eux, sans préjugés donc, découvrir ce qui se cache derrière le mur de leur « planque ».

     Hors de nos territoires connus, nous rampons aussi pas à pas, nous agrippant comme ces curieux félins pour tenter de nous représenter l'univers, des premiers instants (ou même d'avant le temps), jusqu'à son inexorable expansion.

     

    Ils rencontreront comme nous des murs parfois infranchissables,

    Ils entretiendront, comme nous et par la force des choses, une relation particulière à l'invisible.

    Les uns se fondront d'instinct dans l'obscurité, faute de comprendre la nature des éléments qui les menacent, pour survivre.

    Les autres harmoniseront des pigments qui illumineront de simples toiles, des notes noires et blanches qui enflammeront des partitions, pour libérer leur monde intérieur.

    D'autres enfin mesureront, arpenteront le cosmos, avec le frénétique désir de tout savoir.

    Comme si cela était la condition même l'existence: se relier à l'invisible et lui donner un visage, chacun à sa manière.

     L'animal sous forme d'un bruissement,d'une odeur, l'artiste sous les traits et la douceur d'un être aimé ou d'une musique qui rend le souffle court, l'astronome par l'image d'une nébuleuse, d'une étoffe cosmique diffuse.

    Les chats de Cadaques, centre de l'univers

     

     

    Les chats de Cadaques, centre de l'univers

     

    Ces "multivers" ont chacun leur raison d'être.

    Et c'est l'incommensurable territoire restant à défricher, l'exaltant franchissement d'une  frontière à chaque nouvelle découverte, qui est notre vraie marche en avant.

     Un minuscule berceau attendait, de toute éternité, que l'univers s'épanche avec énergie, dans tous les sens, nulle part et partout à la fois.

     

    De cet univers expansionniste, Cadaqués et ses chats peuvent bien être finalement le centre.

     Tout comme la gare de Perpignan d'ailleurs!

     


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